LE CIRQUE ZINDERO

CAROLINE (Charlotte)
ANOUSHKA (Louise)
JOJO (Céline)
MARIE (Marion)
MANUELLA (Nicky)
SARAH (Mary)
FIFI la chèvre (Espigaou)
AMELIE (Cléopatre)
ELYSABETH (Cyrielle)
MIGUEL (Lanèdo)
DAVID (Provo)
PAPOU l'âne (Petit Loulou)
ERNESTO le jaguar et RONALDO (Marco)
FIRMIN et les autres (Elric)

LA VEILLE AU SOIR

MIGUEL
Dans un petit hôtel minable du centre ville, Miguel Maestro préparait ses affaires. Demain, il allait rejoindre le cirque Zindero comme magicien sous l’appellation d’El Maestro.
Pour l’instant il restait perdu dans ses réflexions. Lui qui avait connu la fortune et la gloire sous le nom d’emprunt d’Aristo Bandero, il devait maintenant se contenter de cette tournée dans le cirque de Firmin.
Mais cette tournée tombait bien. Il avait encore besoin de se faire oublier du monde extérieur pendant un certain temps et il savait que pour se cacher le cirque restait encore le meilleur endroit.
Il savait aussi que là-bas, tant que sa véritable identité demeurerait inconnue, il pourrait compter sur le soutien de tous. Le cirque, c’est avant tout une famille. Mais qu’en serait-il si on venait à le percer à jour ? Il valait mieux chasser cette pensée de son esprit.
Pour l’instant tout le monde l’avait oublié, enfin, presque tout le monde. Il savait que quelqu’un ne l’oublierait jamais. Il savait que quelqu’un le poursuivrait jusqu’en enfer et c’est ce qui le condamnait à cette fuite perpétuelle.
Il était resté discret pendant six mois, puis avait déjà changé seize fois de ville depuis la triste histoire, mais qui sait, on est jamais trop prévoyant. Il restait persuadé que personne n’aurait l’idée de venir chercher Aristo Bandero sous les traits de Miguel Maestro simple magicien du cirque Zindero. Oui, personne, pas même son poursuivant, ne pourrait penser qu’il avait rejoint le cirque de Firmin.
Il avait disparu de la circulation depuis deux ans déjà. C'était bien avant les problèmes de Firmin. Il s’était rasé la barbe, avait coupé ses cheveux très courts et avait perdu dix kilos, ce qui aujourd’hui lui donnait presque l’allure d’un jeune homme de 20 ans et ce, bien qu’il en aurait bientôt le double. Les jeunes femmes recommençaient à se retourner sur son passage, ce qui, il faut l’avouer, lui faisait plutôt plaisir.
Même Firmin ne l’avait pas reconnu lors de l’entretien que les deux hommes avaient eu la semaine dernière, et pourtant, leurs chemins s’étaient déjà croisés une fois il y a bien longtemps, il y a si longtemps, le temps d’avant. Miguel aimait bien Firmin et cela lui faisait plaisir de rejoindre sa troupe, il savait que Firmin avait besoin de lui et cela lui faisait plaisir de lui donner un coup de main.
Cette nouvelle aventure démarrait bien…

TOT LE MATIN

SARAH
Le réveil sonna et Sarah ouvrit doucement les yeux. Elle avait mal dormi dans ce nouveau lit. Elle étendit le bras et éteignit la machine infernale qui lui perçait les tympans, puis resta quelques minutes entre ses draps afin de se remémorer ce qu'il lui était arrivé. Mais où était-elle ? Soudain, dans l'obscurité, tout lui revint en bloc : son arrivée tard dans la nuit au cirque Zindero, les quelques mots d'accueil prononcés par Firmin, le directeur du cirque, ses deux chevaux qu'elle avait hâtivement mis dans un boxe et nourris avant d'aller se jeter sur son matelas, harassée...
Ses chevaux ! Il fallait qu'elle aille les nourrir, voilà pourquoi elle avait mis le réveil si tôt, elle s'en souvenait maintenant. Elle se leva donc, se cognant maladroitement contre les quelques meubles de la petite caravane dans la pénombre, et alluma la lumière. Le spot l'éblouit cruellement, mais elle arriva malgré tout à jeter un coup d'oeil dans le miroir en face d'elle, qui lui renvoya l'image d'un visage ovale, encadré de cheveux bruns, avec des yeux bruns-verts soulignés de vilaines cernes. "Pas terrible comme tête pour me présenter le premier jour !" se dit-elle en souriant.
Tout en s'habillant, elle repensait à Firmin. Le pauvre vieux n'avait pas l'air dans son assiette la veille au soir ! Mais il avait l'air si gentil ! Son regard était triste, triste comme celui du chien qui l'avait accueillie hier soir à l'entrée du cirque... mais peut-être se faisait-elle des idées, après tout, il était plus d'une heure du matin lorsqu'elle l'avait vu. Elle jeta un coup d'oeil sur la caravane avant de la quitter. C'était ici, sa vie, maintenant. Ici... à 18 ans, Sarah n'avait pas une grande expérience du cirque. Elle y avait travaillé quelques mois, l'été dernier, mais c'était tout. Elle n'avait jamais vraiment fait partie d'un vrai cirque comme le cirque Zindero... en vérité, elle avait menti à Firmin au téléphone. Heureusement, elle espérait lui cacher cela avec ses futurs numéros, car si elle n'avait jamais fait partie d'un cirque, ses chevaux étaient dressés pour la voltige, ce qu'elle pratiquait depuis l'âge de six ans.
Allons ! Assez rêvassé, au travail ! se dit-elle. Elle ferma la porte de la caravane derrière elle et se mit en route vers l'endroit où elle avait laissé ses deux chevaux. Près de la grande tente, elle croisa un type à l'air un peu bizarre, qui portait un fouet à la main, un dompteur sûrement. Il la dévisagea d'un air étrange. "Bonjour" risqua-t-elle timidement, mais il ne répondit pas et disparut derrière le chapiteau.

PAPOU l’âne
Des chevaux!!!
Il y a bien longtemps que je n'avais pas rencontré un de ces animaux prétentieux qui font tout pour plaire à l'homme ...

Mais ces deux là , avaient l'air sympatiques et la petite était plutôt mignonne ( et oui , les anes sont comme ça!)mais surtout le patron avait laissé partir une étincelle de joie de ses yeux tristes et sans larmes!
Et ....peut être que Sarah voudrait me mettre dans son spectacle , pour que je puisse montrer toute ma reconnaissance à Monsieur Firmin!

SARAH
Sarah resta plantée au milieu du cirque vide, interloquée.
En arrivant près des boxes de ses chevaux, Sarah se sentit de meilleure humeur. Opium et Libellule passèrent tous deux leurs têtes soyeuses par-dessus les portes et hennirent à son approche. Mais leur maîtresse avait remarqué qu'il y avait un troisième boxe à côté, qu'elle n'avait pas vu la veille. Curieuse, elle s'en approcha, mais en prenant ses précautions, on ne sait jamais quelle bestiole il peut y avoir là-dedans, surtout dans un cirque.
Elle aperçut tout au fond un petit âne gris, qui pointait ses deux longues oreilles douces comme de la peluche dans sa direction. Qu'il était mignon ! Et il avait l'oeil vif et intelligent. A qui appartenait-il ? L'imagination de Sarah se mit à galoper aussi vite que ses deux chevaaux réunis... s'il était dans un cirque, l'âne devait être talentueux, peut-être pourrait-elle l'utiliser pour un futur spectacle...
Mais elle se reprit : avant d'imaginer de monter des spectacles abracadabrants, il fallait d'abord qu'elle fasse ses preuves avec Opium et Libellule ! Mais elle gardait l'idée en tête...

AMELIE
Maman n'aime pas que j'aille traîner du côté de la piste.
Elle trouve qu'à mon âge, j'ai passé l'âge des illusions et que je suis dans celui de la raison... Moi je crois surtout que c'est à cause de l'accident de mon tonton Raphaël.
Je le vois bien moi que les yeux de maman ils brillent plus souvent depuis que tonton il est plus là. Parfois même, je l'entends pleurer la nuit dans sa chambre.
Maman, elle a du mal à m'expliquer la mort. Souvent, je vois bien qu'elle invente des histoires exprès pour ne pas à avoir à me parler de Raphaël ou de grand-maman. C'est que tous les deux, ils sont partis très loin, là haut dans le ciel.
Mon grand-père Firmin, lui, il dit qu'ils sont ensembles sur la plus grande piste aux étoiles, et qu'ils sont heureux parce que tous les soirs ils font partie de la plus belle représentation qui soit au monde. Je comprends pas très bien de quelle représentation il parle.
Ce que j'aime bien avec mon grand papa Firmin, c'est qu'avec lui, je peux tout lui dire... enfin presque tout.
Des fois, je lui raconte ce que maman me dit à propos de la piste et de la raison. Lui, il écoute et il hoche doucement la tête. Il dit rien mais je comprends rien qu'à son regard que lui aussi il n'est pas dupe des "mensonges" de maman. Alors, tous les deux, on s'assoit tout à côté des cages où sont les jaguars et on fait le silence.
Le silence, moi ça me plait.
C'est un truc que je sais drôlement bien faire! C'est avec mon doudou que je l'ai appris. Mon doudou de quand j'avais un an. Il est plus petit que moi puisqu'il a six ans, mais il faut pas croire que c'est un bébé! Ca non! Avec lui, c'est comme avec grand-père, on fait le silence et dans le rien du tout, on se parle, rien qu'avec notre coeur.
Maman, quand j'essaie de lui expliquer tout cela, elle hausse les épaules et elle me dit: "Amélie! A ton âge tu ferais mieux d'aller faire tes devoirs plutôt que de raconter des âneries! Bon sang! Quand donc seras-tu un peu plus raisonnable?!"
Et vlan! C'est reparti pour un tour. Les mots de maman entrent alors par une de mes oreilles et s'enfuient très vite par l'autre.
Sans blague! Ca me fiche une de ces trouilles, moi, la raison! Je sais pas trop ce que cela veut dire la raison, mais je suppose que ça doit être quelque chose de très très grave vu la tête des plus grands qui, eux, s'y trouvent en plein dedans!
Ce que maman ne sait pas, c'est qu'un jour, j'ai promis à mon doudou de ne jamais tomber dans la raison! Alors c'est pour cela qu'en cachette, je vais sur la piste... sans que maman me voit, car quand elle se fâche, faut quand même faire gaffe à son matricule!...
Hier soir, avec ma cape et mon épée de Zorro je suis montée sur le dos de Papou.
Papou, c'est l'âne du cirque de mon grand-père Firmin. Malgré ce que les grands peuvent raconter, c'est un âne pas du tout bête. On dirait même qu'il comprend le silence lui aussi! Papou, il est comme mon doudou et Firmin... il est... comment dire... heu... spécial!
Oui c'est ça! Spécial!...

MIGUEL
L’aube tendait à pointer son nez par delà l’horizon obscurcit. Les rayons du soleil, tel le drapeau japonais, donnaient l’illusion de prolonger les bandes rouges et blanches du grand chapiteau. Ma mémoire prenait plaisir à goûter de nouveau aux odeurs si particulières émanant de la ménagerie.
Des gens déambulaient, j’avais l’impression que chacun d’entre eux me dévisageait de la tête au pied. Devant moi, à une dizaine de mètres à peine, une petite fille jouait, assise sur un bourricot. Je me suis approché d’elle lentement.

" Bonjour ! " lui dis-je
" Bonjour Monsieur "
" Il est beau ton âne. Comment s’appelle-t-il ? "
" Lui c’est Papou ........et moi c’est Amélie. "
" Bonjour Amélie, bonjour Papou. " dis-je en caressant l’âne sous le menton machinalement.
" Et toi ? Comment tu t’appelles. "
" Miguel " Lui répondis-je en continuant de caresser le menton de Papou. " Mais ? Qu’est-ce qu’il a Papou ? Descends Amélie ! Viens voir !, je crois qu’il a comme une boule là au niveau du menton. "
" Je ne sens rien " dit Amélie en chatouillant le menton de Papou.
" Tu ne sens rien ? Comme c’est bizarre ? J’ai comme l’impression qu’il nous cache quelque chose dans sa bouche. "

J’ouvris la bouche de Papou et y fit apparaître un œuf de poule.

" Oh ! ! ! ! ! vilain Papou. "
" Tu as raison Amélie, il aurait pu au moins y cacher un bonbon. "
" ça c’est vrai ! Tu n’est qu’un coquin Papou."
" Ne le gronde pas, ce n’est pas de sa faute, mais dis-moi ? Tu aimes les bonbons ? " lui demandai-je, certain de la réponse.
" Si je le pouvais je ne mangerais que ça. Mais maman ne veut pas, elle dit que ce n’est pas bon pour les dents. Mais, si ce n’était pas bon, pourquoi qu’on appellerait ça bonbon alors ? "
" Tu as raison Amélie, mais ta maman aussi à raison il ne faut pas trop en manger. "

Amélie fit une moue significative.

" Tu sais quand j’avais ton âge mon papa me disait que mon nez était une fontaine à bonbon, et à chaque fois qu’il appuyait dessus, un bonbon tombait dans sa main. Je ne sais pas si la fontaine marche encore, tu veux qu’on essaye ? "
" Ton nez ? Une fontaine à bonbon ? Oh, ce serait formidable ! Je peux essayer ? "
" D’accord mais avant tu dois prononcer les mots magiques. Tu connais les mots magiques Amélie ? "

Amélie réfléchit un court instant.

" Euh ? ? ?.......S’il te plaît. " dit-elle tout doucement.
" Bravo ! Je vois que tu connais les mots magiques. Je vais mettre ma main sous mon nez pour récupérer le bonbon au cas où la fontaine fonctionnerait encore. Je compte jusqu'à trois, à trois tu me presses le bout du nez. Mais pas trop fort, sinon cela ne marche pas. Tu es prête ? "
" Je suis prête. "
" 1......, 2........., 3 "

Amélie appuya tout doucement sur mon nez. J’ouvris la main, elle contenait un bonbon acidulé enroulé dans son petit papier orangé. La petite fille ouvrit les grands yeux du bonheur.

" Tu peux me dire où je peux trouver Firmin ? " lui demandai-je
" Bien sûr, je l’ai vu tout à l’heure sous le chapiteau. Tu vas rester avec nous ? " me répondit-elle en défaisant le papier
" Je l’espère Amélie, je l’espère. "
" Chic !, Chic !, Chic !, J’aurai une fontaine à bonbon en permanence. "
" A condition de ne pas oublier les mots magiques, il me semble d’ailleurs que tu en as oublié un. "
" Euh ? ? ?.......Merci. "
" Je me doutais bien que tu le connaissais celui-là aussi. Merci Amélie, à bientôt. "
" Oh oui !, à très bientôt Miguel. "

Je repris mon chemin vers le chapiteau, laissant Amélie jouer avec papou, en suçant son bonbon, un œuf à la main...

CAROLINE
Je m'appelle caroline.
Je regarde la piste et je me demande...
Je ne sais pas bien ce que je me demande. Le cirque ne va pas bien mais moi j'y suis heureuse, enfin autant que faire se peut après tout ce qui est arrivé... C'est ma famille vous comprenez, depuis maintenant...bah, je ne compte plus. Le temps a passé ici à l'abri de tout et si je n'ai rien oublié, si rien ne s'efface, j'ai vécu ici au chaud et je n'aspire qu'à continuer.
Je ne me souviens plus en quelle année je suis arrivée, Raphaël était déjà là, lui depuis toujours puisque sa mère fut la compagne de Firmin. Mais Firmin n'est pas son père, enfin pas son vrai père bien qu'il en ait joué le rôle, un peu durement (les méthodes éducatives de Firmin ne sont pas des plus tendres) mais avec toute l'affection dont il était capable. L'enfant avait montré très jeune de remarquables dispositions et Firmin décida d'en faire une étoile.
Aujourd'hui, Firmin m'a prise sous son aile. L'accident l'a marqué terriblement, il a changé lui aussi, pris un sacré coup de vieux. Et moi je ne suis plus capable de voler, plus capable de grand chose d'ailleurs, je suis esquintée de partout. Il y a eu ma vie avant l'accident et ma vie depuis. Ma vie avant c'était certitudes et passion: Raphaël, mon compagnon dans la vie, compagnon de voltige, trapéziste de génie, mon professeur, mon mentor, ma référence, n'était pas encore parvenu au sommet mais on commençait à beaucoup parler de lui.
Tous les numéros qu'il montait impressionnaient par leur audace, leur virtuosité et leur poésie. J'étais fière d'être devenue sa partenaire. On commençait même à l'inviter pour des galas en dehors du cirque. Et puis voilà, un dimanche de mai, il y a un an jour pour jour, 3 représentations dans la journée, une nocturne exceptionnelle la veille pour célébrer je ne sais plus quoi, l'énervement, la fatigue, le retard pris, le public qui attend et s'agite...On accélère les préparatifs. Qui donc a oublié de vérifier l'attache des trapèzes? Bien sûr nous travaillions sans filet, c'est aussi ce qui avait contribué à notre succès. Non seulement les trapèzes ne furent pas vérifiés mais personne, absolument personne, ne songea à demander s'ils l'avaient été.
C'est allé très vite.
Nous, là haut sur l'esplanade.
Le trapèze arrive, mon compagnon l'empoigne d'une main et m'enlève de l'autre...l'une des cordes cède, nous perdons l'équilibre, je pars dans le vide sans avoir le temps de rattraper le second trapèze qui venait à ma rencontre un peu plus bas.
Comprenant tout très vite, Raphaël me regarde tomber et le trapèze manchot traverse l'espace à la vitesse de la lumière le projettant violemment vers la structure métallique de l'autre côté de la piste.
Mort sur le coup, mort avant de toucher terre.
Quant à moi j'allai m'écraser quelques 10 m plus bas sur les matelas mousse qui tapissaient le sol. S'ils ne suffirent pas à amortir la violence de la chute, sans doute me sauvèrent-ils la vie. Bassin brisé, un bras cassé.
Après des mois d'hopital et de maison de rééducation je recommence à marcher normalement, mais ma tête est malade, toujours brisée.
A la sortie de la maison de rééducation, Firmin m'a proposé l'emploi de "guichetière". J'acceptais. De toute façon je n'avais pas le choix, et je tâche maintenant de me reconstruire et de reprendre goût à l'effervescence des spectacles. Serai-je jamais capable de remonter sur un trapèze? Pourtant en rêve je le fais, je le fais chaque nuit, mais invariablement je m'écrase par terre. Firmin et les autres m'encouragent, leur chaleur m'est précieuse mais le cirque a bien d'autres problèmes et là maintenant il faut serrer les rangs si on veut s'en sortir. Alors mes frustrations je les laisse au vestiaire.
Depuis l'accident, qui a choqué le public et les médias, il semble qu'une sorte de malédiction se soit abbatu sur le cirque Zindero. D'abord on nous a beaucoup reproché d'avoir privilégié le spectaculaire au déficit de la sécurité. C'était pourtant ce qui attirait tant de monde, mais on ne nous pardonna pas la mort du héro.
Et puis Mélissa, la mère de Raphaël, s'en alla à son tour. Un cancer la minait depuis quelques années mais elle se battait et Firmin avec elle. Le chagrin lui enleva toutes ses ressources, elle ne désirait plus s'en sortir, elle partit sans bruit 6 mois après son fils.

Firmin reporte sur sa petite fille, Amélie, toute sa tendresse. Et moi je fais de même, cette enfant est notre joie de vivre!

SARAH
Sarah nourrit ses chevaux assez distraitement. Eux n'avaient pas l'air perturbés par leur nouvel environnement. Le bruit calme et régulier de leurs mâchoires dans l'orge qui remplissait les mangeoires se mêlait aux premiers murmures du cirque qui se levait. La jeune fille entendait du bruit dans quelques roulottes voisines, un rire d'enfant, un tigre qui rugissait de faim, une chanson bohême... Et elle, Sarah, était au coeur de tout ça ! C'était sa nouvelle vie. La vie qu'elle avait toujours rêvé d'avoir, depuis le jour où, petite fille, son père lui avait avoué que sa maman ne reviendrait plus. Sur le moment, elle avait eu peur, elle avait cru que sa mère était morte, et puis, vu la tête que faisait son père... Mais il lui avait expliqué que maman aimait plus le cirque que son mari sédentaire et qu'elle était partie vivre sa vie. Et depuis ce jour-là, l'imagination de Sarah n'avait pas cessé de galoper.
Son père était un homme bien, gentil, compréhensif, mais le départ de sa femme avait brisé quelque chose en lui. Un jour, lorsque Sarah avait huit ans, il s'était mis dans une colère noire car elle avit vu l'affiche d'un cirque qui passait près de chez eux et lui avait demandé de l'y emmener. Mais le pire fut lorsqu'elle découvrit la voltige équestre, et qu'elle se mit à exécuter des figures de plus en plus spectaculaires... Il faisait tout pour l'en dissuader, et un jour, au cours d'une violente dispute, il lui avait crié : "Mais tu es aussi inconsciente que ta mère !". Et ce jour-là, Sarah sut que son père ne comprendrait jamais sa passion, tout comme il avait refusé d'accepter celle de sa mère. C'était pourtant un homme bon, mais il ne pouvait pas le comprendre. Le cirque, on l'a dans le sang ou on ne l'a pas. Et Sarah espérait vraiment l'avoir. Et elle allait le vérifier dans les jours qui venaient.

CAROLINE
Ce matin comme tous les matins je regarde la piste.
J'aime me lever la première. Je vais sous le chapiteau, je m'assois ici ou là, je me souviens.
Tout le monde dort encore. J'aime cette sensation d'être la seule debout, d'entendre et d'écouter ce que personne n'entend.
J'en profite alors pour arrêter le temps et parfois je m'en vais si loin dans mes pensées qu'alors tout m'est rendu.
Je regarde là haut les trapèzes immobiles et puis tout doucement ils se mettent à bouger et Raphaël surgit applaudi par la foule. D'un geste large et assuré il balaye l'espace, capte les attentions, rassemble les regards: il salue le public, SON public. Alors comme chaque fois moi je suis fascinée...je le vois s'élancer, poser ses pieds sur l'air, envahir mon ciel...
Est-ce ainsi donc la vie: tout donner pour mieux reprendre?
Il me vient parfois d'irrésistibles envie de partir le rejoindre. Et puis les premiers bruits....l'âne Papou d'abord qui vient doucement me bousuler du museau comme pour me faire sortir de ma torpeur. Puis la voix de Firmin, tonitruante exigeant qu'on aille réveiller sa fille, il a quelque chose à lui dire! Rire: tous les matins Firmin a quelque chose à dire à quelqu'un, c'est plus fort que lui il ne supporte pas qu'on traîne au lit.
Et voici notre ravissante et vaillante Sarah déjà affairée auprès de ses chevaux, des idées plein la tête, patiente et energique. Mais c'est le rire d'Amélie qui seul me permet de réagir; pas un rire non, un débat d'oiseaux! cette enfant est un ange et cristallise l'espoir dont on va tous avoir besoin ici.
"Amélie?"... Je l'appelle et quand je la prends dans mes bras pour un bref calin c'est la vie qui revient.
"Tu as bien dormi ma puce?
- Oh oui Tatie colline!..."
Quand elle était toute petite fille elle ne parvenait pas à dire "Caroline" et je devenais "coline". Puis un jour elle a appris à lire et à écrire, alors elle m'a dit " tu es tatie Colline avec 2 l, c'est plus joli". Chère Amélie! Déjà poète comme sa mère, souple et déliée comme son oncle, le tempérament affirmé de son grand père...Si moi je suis "colline" Amélie est l'oiseau qui s'y pose, la seule par qui je supporte d'être embrassée. Depuis le départ de Raphaël le moindre contact m'est devenu insupportable. Ou alors est-ce mon corps qui en a trop vu, cassé, réparé, manipulé...?
Allons! La journée commence. Je me lève pour rejoindre Firmin tentant de dompter ce très léger boitillement qui subsiste encore. Léger mais haïssable: je me deteste ainsi, je ne me reconnais plus. Un jour Manuella, Manuella la sorcière comme l'appelait Raphaël pour la faire enrager, m'a dit de sa voix rauque et chaude: "tu es stupide! regarde, on dirait que tu danses, foi de Manuella!".
Je danse oui, comme danse les infirmes de la vie! Oh et puis quelle importance, quand je vends mes billets, nul ne voit marcher...

PAPOU
l'avantage d'être un ane qui ne sert à rien , c'est de se rendre partout, de tout voir, de tout entendre sans que personne ne vous reproche votre curiosité....
Et moi, je vais toujours où il y a un morceau de pain, de sucre ou une petite caresse!( savez vous que les anes aiment les bisous et les caresses!)

Je ne sais pas pourquoi, peut être mon instinct animal mais je sens le cirque revivre et c'est très bon pour moi, plus il y aura d'enfants au cirque et plus, il y aura de gateaux au sol après le spectacle.

Je traîne partout. Ainsi,je vais souvent rendre visite à Caroline la guichetière et je lis toujours son vertige dans ses yeux. Pourtant, lorsqu'elle est à la caisse , elle a toujours le sourire aux lèvres avec les clients mais lorsque le chapiteau est vide et qu'elle regarde le trapèze, je vois alors les larmes au fond des yeux.
Je passe ma tête sous son bras pour qu'elle me caresse le nez et me chuchote à chaque fois,
-Si tu savais mon Papou!
Je sais mais je ne sais pas parler, je sens seulement ce qu'elle ressent ...

Aujourd'hui , elle m'a dit:
-Attend Papou, je vais te tirer les oreilles , c'est pour rire mais je suis certaine que tu vas me porter bonheur !!!

ANOUSHKA
L’angoisse de la page blanche. Un moment déjà que je ne l’avais pas rencontrée. Et presque la sensation que ça me manquait… Complètement farfelue cette impression. Ecrire me manquer ! Ridicule. Combien de fois, pendant que je froissais feuille sur feuille, allumais cigarette sur cigarette et buvais café sur café, sous un éclairage clignotant pour cause d’ampoule par changée, et devant une pendule indiquant deux heures du mat, ne me suis-je pas répété que dès que je pourrai, j’arrêterai ?

C’est pas comme ça que je suis censée commencer… C’est pas que j’ai perdu le coup de main, c’est que je l’ai jamais eu. Non, j’ai eu le culot de me prétendre écrivain, et je suis pas fichue de commencer un journal intime. Contre-performance déplorable.

Et puis je m’en fous, de toute façon, les premières lignes faut toujours les réécrire, alors autant les sauter.

Je voulais raconter quoi déjà? Ma vie… Cool !

Mais je fais comment ? Comme chez un psy du style " allongez-vous et dites-moi à quoi vous pensez " ou alors un truc logique, chronologique comme les bios qu’on trouve dans le dico ?

Trop fastidieux la deuxième solution, on va prendre la première.

Oui, écrire me manque, aussi drôle que cela puisse me paraître, c’est vrai. J’ai toujours crû que je garderai un souvenir épouvantable de ces années passées dans une chambre de bonne parisienne, portant selon la législation en vigueur le nom pompeux de " studio " et pendant lesquelles j’allais faire mes courses avec une calculatrice dans la poche pour comparer le prix des yaourts. Ce serait mentir de dire que c’était génial, j’étais malheureuse, solitaire dans l’une des villes les plus animées du monde, bref, rien de bien réjouissant. Et pourtant, quand on pense à ce qui devait suivre, c’était le paradis.

Ma vie a toujours été un échec. Au début, j’en étais la seule consciente, et puis c’est devenu une évidence pour tout le monde. J’ai l’impression d’être une inadaptée perpétuelle. Incroyablement sédentaire parmi les gens du cirque, profondément foraine avec les autres.

Fille du directeur d’un cirque. Quand je dis ça, tout le monde s’imagine une enfance au milieu des cotillons et des paillettes, complètement magique et en dehors de la réalité. Et ben faut croire que pour moi ça a jamais été le cas. J’ai grandi au milieu de gens qui ont " ça dans le sang ", qui aiment ce qu’ils font, vraiment. Moi, allez savoir pourquoi, j’ai jamais accroché. J’ai pas été tendre avec mes parents, j’ai tout rejeté en bloc et je ne sais toujours pas pourquoi : la magie à laquelle je n’ai jamais crû, les animaux qui me terrorisaient, et la voltige à cause d’un vertige insurmontable. A douze ans, rien que le mot " chapiteau " me donnait des boutons. Je suis partie, en pension d’abord, et puis je me suis installée à Paris.

La pension ça a été l’enfer sur terre, même si je ne l’avouerai jamais à personne pour tout l’or du monde. Je me suis sentie profondément intellectuelle tant qu’il s’est agi de cours par correspondance, le jour où il a fallu affronter de véritables profs, ça m’a fait l’effet d’une douche froide. On m’avait prévenu de tout sauf de ce qui me ferait souffrir : on m’avait parlé des heures à tenir assise et dont je n’avais pas l’habitude, du silence à respecter, des devoirs, du stress, des examens, etc., etc. Tout ce dont ce rappelait la troupe de mes parents, et pour qui le mot " école " sonne comme " prison ". Ce qui m’a fait vivre la pension comme un séjour dans un cabinet de torture, c’est pourtant autre chose. Dans la " vraie vie ", les gens sont différents, méchants je trouvais, même si le terme est sans doute excessif. Je me sentais seule dans le cirque et je croyais pouvoir trouver ailleurs des gens plus proches de moi. Erreur : ailleurs, la solitude, c’est la règle commune, voilà tout. Chacun pour soi et Dieu pour tous si vous y croyez.

J’ai compté les jours qui me séparaient de mon bac. Encore fallait-il l’avoir. Les résultats étaient " médiocres " selon mes profs. Comment dire ça à des parents déjà déçus d’avoir une fille allergique à leur vie, et qui se consolent en la prenant pour Einstein ou Stendhal réincarné ? J’ai menti. Aujourd’hui, je regrette moins que jamais, à quoi ça aurait servi de faire vivre ça à maman ? J’ai été voir le proviseur et je lui ai calmement expliqué la situation, l’impossibilité d’envoyer les bulletins scolaires à la maison puisqu’on avait pas d’adresse, et tout et tout. Je m’en suis si bien sortie que je suis devenue la détentrice de mes relevés de notes qu’il me suffisait de trafiquer un peu. Si le cirque m’a appris quelque chose, c’est à être débrouillarde. Un petit coup de blanc, un petit chiffre ajusté à ma " réelle valeur " et je devenais première de la classe.

J’ai eu le bac. Et je n’ai pas abandonné. Le cirque, je ne voulais pas y retourner, ça aurait été m’avouer vaincue. Je me suis trouvé une vocation sans contraintes (enfin, c’est ce que je croyais) : écrivain. Mais voilà, ça nourrit pas franchement quand on a pas de talent. J’ai entamé des études jamais terminées. Bref, j’ai vivoté à Paris, un peu hypnotisée par la ville lumière, même si ça paraît étrange pour une fille née dans les lampions.

J’avais dix-huit ans quand je suis tombée enceinte d’Amélie. Pour moi, c’était le grand amour qui doit durer toute une vie. Le problème, c’est que sur les deux, j’étais la seule à penser ça. J’ai donc débarqué un beau matin sous le chapiteau paternel, entièrement habillée chez " Future maman ". Mes parents ont été fantastiques. Toute la troupe aussi, il faut l’avouer. Je suis restée quelques mois au cirque, et puis j’ai craqué. J’ai commencé une vie à deux cents à l’heure. J’avais décidé d’écrire un bouquin et de le publier, pour assurer l’avenir d’Amélie. Il me fallait être à Paris pour contacter des éditeurs et chercher un emploi stable. Amélie est restée au cirque avec ma mère. Ma mère a été épatante sur ce coup-là. Elle n’a jamais essayé de me piquer ma place mais elle a voulu me donner une chance de m’en tirer. Je me suis dédoublée. A Paris, après je ne sais combien de rejets du manuscrit, les petits boulots sont apparus. Distribuer des tracts en patins à roulettes en plein mois de décembre quand on n’a jamais su faire du patin à roulettes, faire la plonge dans un resto britannique, ce genre de choses. D’un autre côté, je dormais dans la roulotte au moins quatre nuits par semaine, à coup d’autoroutes et de routes de campagne.

Amélie grandissait. Elle est fantastique. Fascinée par le cirque, mais je ne peux pas lui en vouloir.

Et puis le drame, ou plutôt les drames sont arrivés.

Quelle idiote ! A quoi ça sert de pleurer maintenant ? A rien. Ça mouille le papier, et ça n’a rien de constructif.

Je m’en suis tellement voulu. J’étais pas là, le soir où ça c’est passé. J’étais pas là et c’était mon frère. N’importe quel psy dirait que j’ai mal parce que j’ai pas pu lui dire au revoir. Je m’en fous de ce genre d’avis d’expert. J’ai vu mon père pleurer, ma mère ne plus vouloir de la vie, et j’ai vu les yeux de ma fille. J’ai compris que je ne pouvais pas indéfiniment jouer à la gamine capricieuse. Je suis rentrée " à la maison ". Au moins ça m’a permis de vivre vraiment avec Amélie et de passer un peu de temps avec maman avant que…

Mais où ils sont les mouchoirs ?

Je vais me faire à vivre ici. Même si je me sens profondément inutile. Après tout, je ne le suis pas plus qu’ailleurs. Faut que j’aide papa à sauver son cirque, après je penserai à moi, à mon avenir. Et puis, c’est peut-être ici que se trouve celui qui remplacera un jour le père d’Amélie.

C’est vraiment stupide cette idée de journal ! Et si quelqu’un trouve ça, je fais quoi ? Je vais déchirer ça tout de suite et on n’en parlera plus !

AMELIE
Quand je serai grande, je serai trapéziste. Ou alors chauffeur de bus... j'hésite.
Trapéziste, ça me plairait bien. Voler dans les airs comme un oiseau... d'un autre côté, j'ai un gros problème, c'est que j'ai le vertige! Alors c'est pas très recommandé quand on veut être acrobate... Chauffeur de bus, ça me plairait drôlement! Le problème c'est que ça plait pas du tout à maman! Elle trouve que ça fait pas assez fille. Elle a de ces idées maman! Comme si c'était très important que ça fasse fille ou pas?! Le principal c'est que ça me plaise non?... De toute façon, trapéziste non plus ça lui plait pas à maman! Elle dit que c'est pas un métier. Moi, je crois surtout que c'est parce que ça lui fait peur depuis l'autre accident.
Mais est ce qu'on doit vivre toujours dans la peur? La dernière fois que je lui ai répondu ça, elle m'a regardé avec de grands yeux étonnés. Je crois que ça l'a fait réflèchir. Du coup, elle m'a serré fort dans ses bras et elle s'est mise à pleurer. Moi, j'ai pas tout compris le pourquoi du comment, mais je l'ai serré aussi très fort, de toutes mes forces. C'est que je l'aime à ma maman, même si souvent on se comprend pas très bien.

En fait, plus je réfléchis à ce que je voudrai faire plus tard et plus j'hésite.
La semaine dernière, j'ai croisé Manuela. Elle a une de ces allures! Moi, je la trouve plutôt belle, même si elle me fiche un peu peur. C'est que Manuela, c'est une vraie sorcière! Heu enfin, une voyeuse ou une voyante je sais plus comment on dit. En fait, elle sait lire l'avenir! Et même le passé, mais là je trouve que c'est moins difficile puisque c'est déjà arrivé!
Quand elle pose ses yeux noirs sur moi, j'ai comme des frissons dans tout le corps.
Une fois, y a très longtemps, elle a pris ma main dans les siennes et elle a fermé les yeux. Ensuite, au bout d'un long moment, elle m'a soufflé dans le creux de l'oreille "Bella, bella, bella chica, plous tard, tou seras une bella princessa!"
Moi, ça m'a un peu perturbé et sur le coup je lui ai répondu que je voulais pas du tout, mais alors pas du tout être princesse. "Ca correspond pas à mes projets, que je lui ai dit. Plus tard je serai chauffeur de bus!"
Elle m'a regardé d'un drôle d'air, Manuela. Et puis elle a éclaté de rire et elle m'a embrassé sur le front.
Moi, ça m'a un peu vexé. Mais quand même, la bise sur le front, par contre, ça m'a plutôt fait plaisir. C'est que Manuela, elle a pas vraiment la réputation d'être aimable! Alors, la bise sur le front, soit elle lui a échappé, soit elle a apprécié mon projet pour mon futur métier! Et c'est bien la seule jusqu'à présent!

Manuela, je la trouve magnifique.
Avec ses airs majestueux quand elle traverse le campement, elle me fait penser à une reine espagnole... et sa roulotte alors! C'est la caverne d'Ali baba!
Souvent, sans me faire voir, je me faufile jusqu'à sa fenêtre. Là, sur la pointe des pieds, je me soulève juste pour voir. C'est trop beau! Dedans, la lumière est rouge. Et Manuela est devant sa boule de cristal. Elle a les yeux fermées et tout à coup, elle fait de drôles de gestes avec ses mains et elle se met à murmurer des mots que je ne connais pas.
Quand elle rouvre ses yeux, ils sont plus brillants que jamais. Et elle relève sa tête d'un air tellement fier que parfois il m'arrive de l'imiter, juste parce que ça me plait! Même qu'une fois, maman m'a surprise et elle m'a disputé drôlement en disant que j'avais des mimiques d'orgueilleuse!...
Moi, quand je serai grande, je voudrai bien être fière comme Manuela! Je voudrai bien qu'on ait un peu peur en me voyant... en fait, j'ai trouvé! Quand je serai grande, je serai comme Manuela, je serai diseuse de bonne aventure! Voilà!... et si j'arrive pas à voir l'avenir dans ma boule de cristal, ben c'est pas grave, je serai chauffeur de bus!...

Aie! J'entends maman qui m'appelle! Vite, vite, elle va me dire encore que je rêve trop... comme si on pouvait trop rêver!...

MANUELLA
Manuella est mon nom !
Gitane par mon père et ma mère ,
D’ un coup d’œil vous me reconnaitrez !
Mes longues jupes à volants multicolores balaient chaque parcelle de l’ enceinte de ce cirque où je règne en quelque sorte depuis toujours …
Firmin m’ a recueillie à l’ age de 25 ans , à la mort de mes parents, et j’ en ai aujourd’hui 40 ! .
Ah ! Firmin !!… Je lui dois tout …
A mon regard noir et perçant , rien n’ échappe !
Je connais tous les secrets du cirque et de ses habitants et je peux vous dire qu’ il s’ en est passé des choses dans cette grande famille que nous formons !…Des drames , des bonheurs aussi , des choses pas toujours avouables , des mystères que moi , j’ ai bien vite élucidés grâce à ma boule de cristal ! …
Je suis un peu la mémoire de ce cirque .
Je suis la confidente , la conseillère de tous les membres de cette troupe dont j’ essaie de garder les secrets …
Oh ! Je sais bien que certains ne viennent me voir que par intérêt … c’ est pour ma boule de cristal qu’ ils se déplacent aussi souvent … D’ autres vous diront que je manipule les gens en me servant de mes dons , mais ceux- là , ce sont les méchantes langues du cirque !
Ils vous diront aussi qu’ il faut que je me mêle de tout ! En fait , ce sont les autres qui me mêlent à toutes ces vies dont je connais le passé et l’ avenir ! …
En tous cas , ma porte reste toujours grande ouverte : seul un léger rideau transparent , agité au moindre souffle du vent , veille sur l’ intimité de ma roulotte .
Ma roulotte ? Elle est repérable entre toutes , par ses peintures vives et ses multitudes d’ étoiles qui la constellent . Un grand oiseau multicolore perché sur le toit , accueille les visiteurs .
" MANUELLA , DISEUSE DE BONNE AVENTURE " s’ étale en lettres capitales !
De la cheminée s’ échappe une fumée amicale .
A l’ intérieur , des bougies par dizaines diffusent une douce lumière propice à la concentration et à l’ intimité , et font danser ma boule de cristal.
Les soirs de grand spectacle, je noue un foulard dans ma longue chevelure noire et bouclée ; j’ enfile ma plus belle jupe à volants et dans les anneaux qui ornent mes oreilles se reflètent toutes les lumières du cirque !
C’ est la fête !! Je vais à la rencontre de mon public , moi aussi !
Je lui prends la main , la retiens un moment , et lui révèle son avenir …
Les lignes de la main n’ ont aucun secret pour moi …et les gens sont toujours subjugués par ce que je leur révèle ! Pour me remercier , ils glissent discrètement un billet dans l’ échancrure de mon décolleté .( mais …chut ! Firmin ne serait pas content … !)
Tout en me concentrant sur toutes ces mains que je m’accapare , je garde néanmoins , un œil sur le déroulement du spectacle !
Je sais d’ avance si la représentation va bien se passer ou non …
Comme ce soir funeste , il y a quelques années , où je savais que le drame se produirait…
Je l’ avais prévenu Firmin pourtant ,que la petite allait se blesser…
Les trapèzes et le filet avaient pourtant faits l’ objet d’ un contrôle sévère …
Les visions qui avaient hanté mon esprit nuit et jour ne m’ avaient pas trompée…ni celles qui se sont imposées à moi par la suite : personne n’ avait voulu croire en mes prédictions noires ; on me traitait d’ oiseau de mauvaise augure …Pourtant l’ avenir a fait ses preuves : toute une série de malheurs s’ est abattue sur Firmin et , par la même, sur le cirque tout entier …
Cela a commencé par la fuite des jaguars … ils rugissaient dans ma boule de cristal depuis longtemps déjà … puis par la mort du fils de Firmin , puis … Oh ! des choses terribles sont encore arrivées , mais je vous raconterai peut être… un jour …
Le cirque Zindero est toute ma vie !
J’ y ai vécu des amours folles et entières , des amitiés indestructibles , des inimitiés aussi …
J’ ai tout partagé : les joies , les peines , les haines …
Je n’ ai jamais su garder un homme …
Trop indépendante , trop bohème , trop soupe au lait , trop grande-gueule ; trop de trop …
Je peux être d’ une humeur exécrable …
J’ ai le sang chaud des gens du sud !
Mieux vaut prendre des gants et tourner 7 fois sa langue dans sa bouche avant de m’ adresser la parole …
J’ aime ou j’ aime pas ! et quand j’ aime pas … !!! …tous les volants de ma jupe se mettent à froufrouter et les anneaux de mes oreilles à cliqueter méchamment !!
Mais quand j’ aime … je donne tout ! et je peux même devenir envahissante …
Tenez ! Prenez Firmin par exemple ! Je lui dois tout et je ferai n’ importe quoi pour qu’il retrouve le sourire …Chut ! …Pour tout vous dire , il n’ a jamais été heureux avec sa femme …gentille mais mièvre et sans caractère …Paix à son âme …
Bref ! En un mot , je suis capable du pire comme du meilleur !
La fougue coule dans mes veines et le rythme des musiques et des danses légué par mes ancêtres anime à chaque secousse mon corps , qui d’ une étincelle s’ enflamme !!
Partout , je passe comme une tornade !
Mon énergie , il faut que j’ en donne un peu à Firmin , il va en avoir besoin …
Il faut que je le soutienne de toute mon âme et de tout mon corps !
Il faut que le spectacle continue , il faut que le cirque Zindero re-vive !
Foi de Manuella , la vie va reprendre le dessus !!!

MARIE
Je m'appelle marie et je viens d'une famille espagnole, j'ai 18 ans et je suis là, dans ce cirque où mon père est cracheur de feu.
Ma mère a toujours eu de bonnes intuitions mais elle s'en servait comme on prévoit la pluie et le beau temps.
Mais pour mon père c'était utile comme pour les grands moments de représentation,ou elle lui disait:mon chéri tu peux y aller ce soir tu seras applaudis.

Mais bon ça en restait là,elle ne cherchait pas en savoir plus.
ma grand mère faisait les lignes de la main et les cartes, j'ai essayé plusieur fois de poser des questions mais elle me répondait par d'autres questions.
Pour elle je dois apprendre à vivre sans connaitre le futur et ne pas faire comme sa mère.
mais plus je me posais de questions et plus cela me donner envie d'en savoir d'avantage.

C’est vrai, je dit que la voyance, la magie, les cartes me font peur mais elles m'intriguent, me fascinent depuis longtemps;
les cartes des gitanes sont vraiment belles, si vous pouviez voir leurs couleurs, leurs images, comme le TAROT DE MARSEILLE (le fou, la reine, l'étoile, l'amoureux, la roue de la fortune) ou les RUNES ces petites pierres qui comme le dit la légende pour avoir un jeu, il faut aller les chercher apres une nuit d'orage ou de pluie pouir qu'elles soient plus efficace car elles contiendront plus de magnétismes.
COMMENT JE SAIS TOUT CA ??????
et bien en regarddant ma grand mère.
allez savoir si elle m'a vue????

J'ai 18 ans et je sais que je suis jeune pour tout ça mais je sais qu'au plus profond de moi j'en rêve.
Alors vous comprenez pourquoi je n'en parle pas à ma mère
Ce que je ressens, je le sens depuis longtemps mais particulièrement depuis les derniers évènements et la troupe qui se posent des questions sur l'avenir mais ils n'en parlent pas.
Je sais qu'ils sont tous, tous solidaires car FIRMIN,leur a apporté beaucoup et pour beaucoup un travail, une famille
alors il faut remotiver la troupe et de nouveaux numéros avec de nouvelles têtes, je crois que ça firmin s'en occupe

Je ne voulais pas lui en parler, enfin pas tout de suite .
ALORS j'ai pris mon courage à deux mains et je suis allee voir les filles dans leur caravanes,
elles ont ete tres chaleureuse avec moi et m'ont ecouté parler, je leur ai expliqué ce que je peux ressentir quand je rencontre une personne, quand je me trouve dans un lieu inconnu ou quand je sers la main de quelqu'un.
Elles m'ont expliqué certaine chose comme de faire le vide quand un flash vient et de faire barrage avec mes pensées
et de m'ouvrir d'avantage à la vie et à mes emotions car je suis timide.
Mais ça on me la dejà dit ainsi que j'avais du charme et pas mal de fealing mais ça c’est une autre histoire.
ah! j'ai oublié de vous dire, j'ai demandé à manuella de me lire l'avenir
et vous savez ce qu'elle m'a repondue ?????
DE REVENIR LA VOIR PLUS TARD !

AMELIE
J'ai toujours vécu avec le cirque. Du plus loin que je me souvienne, les clowns, les acrobates, les animaux et les magiciens ont toujours fait partie de ma vie. C'est le seul univers que je connaisse. C'est mon monde à moi.
Maman, quand je lui parle de tout cela, elle m'écoute pas vraiment. Je crois que ça l'intéresse pas vraiment. Je crois aussi que moi, je l'intéresse pas trop non plus. Ca, je m'en suis rendu compte petit à petit. Faut pas me prendre pour un bébé!
Déjà, maman, avant, je la voyais pas trop souvent. C'est chez grand-père et grand-mère que j'habite depuis très très longtemps. Et puis, j'ai pas de papa. Heu enfin, comme le dit Firmin, j'ai un papa, sauf qu'il a jamais été là. Je comprends pas bien comment on peut avoir un papa qui n'a jamais été là... mais bon, je comprendrai ça plus tard il parait.
Donc j'ai un papa pas là et une maman qui est là depuis pas bien longtemps. J'ai une maman qui me comprend pas bien non plus et qui lève les yeux au ciel quand je lui parle de ce qui me plait. Bref, je crois que je suis pas la petite fille qu'elle aurait aimé avoir.
C'est comme ça.
C'est un peu comme quand on vous offre un doudou et que c'est pas celui là que vous vouliez. En fait, maman, elle a pas trop de chance.

Des fois, j'aimerai bien discuter de ça avec Firmin. Mais j'ose pas trop. Alors je le dis à mon doudou. Parce que lui, il peut vraiment tout entendre.
Le seul problème, c'est que des fois j'aimerais bien qu'il me dise des paroles, parce que moi, je lui parle, je lui parle, mais lui, il fait que me regarder avec ses grands yeux, comme un bébé, en fait il dit tout avec ses yeux mais rien avec sa bouche... je crois qu'y a que moi qui ai grandi et que lui, il est resté tout petit.
J'ai jamais ses mots qui pourraient m'expliquer... C'est comme quand je demande à grand papa pour qu'il me raconte quand il était petit. Il me donne jamais de mots.

Il fait le silence, là, d'un coup. Alors, moi aussi je me tais. Peut-être que lui aussi, quand il était petit, il était pas le petit garçon que sa maman aurait voulu...? Et qu'à force de rien dire, ben, il a oublié les mots pour raconter tout ça...? Moi, j'aimerai bien qu'il me raconte...
Tiens! J'ai une idée! Et si j'allais demander à Manuella? C'est vrai ça! Puisqu'elle sait lire le passé, sûr qu'elle va pouvoir me raconter!... Le seul hic, c'est qu'elle me fiche un peu la trouille...
Je sais pas si j'aurai le courage... Faut que je réfléchisse.

DAVID
Je fais partie de cette grande famille comme aime l’appeler Firmin. C’est ainsi qu’il m’a accueilli, comme un nouvel enfant. J’ai frappé à sa porte comme on frappe à une porte de secours. C’était il y a cinq ans déjà. Devant lui, j’avais gardé la tête baissée. Je me trimballe un complexe terrible. Je bégaie. Je voulais un travail, n’importe lequel. Mais je n’ai pas de don artistique. Firmin m’a demandé mon nom. Forcément tout ce qui commence par un b ou un d c’est une catastrophe chez moi. Cela a donné à ceci : d.d..daaa…daaa VID ! Après j’ai répondu aux questions d’un signe de tête. Firmin a déclaré : bienvenue dans la famille David

J’ai du travail pour toi.

J’ai fait tout ce dont j’étais capable faire. J’ai appris le reste au fil des jours. Pour moi il n’y avait aucune tâche ingrate. Je suis partout à la fois. J’en suis même à repriser les costumes des artistes. Si au début on a posé sur moi des regards curieux et méfiants, j’ai su que Firmin était intervenu en ma faveur. Cela gênait beaucoup de monde mon silence et ma tête baissée.

Firmin leur a parlé de mon bégaiement et de ma terrible timidité. Devant mon sérieux, mon travail appliqué, ma disponibilité je n’ai que des amis depuis. Je peux nourrir les animaux, comme surveiller chaque construction du chapiteau. Je ne reste pas en arrière, je suis là au milieu de tous.

Les malheurs du cirque je les ai subis aussi, en quelque sorte. Je ne savais pas comment aider enfermé dans mon silence. Mais j’étais là et Firmin me remerciait sans cesse. Il bénissait le jour où il m’avait embauché. J’ai fait en sorte d’être le plus utile possible, malgré mon silence je passais toujours un peu de temps avec tout le monde, proposant mon aide ou anticipant les problèmes.

La vie de la famille du cirque n’a aucun secret pour moi. Beaucoup se confient à moi. J’écoute tête baissée et le réconfort que j’apporte c’est toujours d’une petite tape sur l’épaule ou d’une caresse sur la joue. C’est rien mais tous me remercient.

J’ai du effrayé une nouvelle que Firmin venait d’embaucher. Comment répondre à son bonjour ? Encore un b de trop ! Et un salut ç’est un peu trop familier. J’ai continué ma route, j’allais remettre en place un fouet qui traînait une nouvelle fois. Je préférais ne pas entendre : Mais où donc ais-je mis cela ? Mais plutôt : Ha ! David ! Si tu n’étais pas là !

Je sais que la mère d’Amélie s’inquiète pour elle. Je l’entends souvent sermonner sa fille. Je sais toujours où est cette petite fille, cela fait partie de moi cet instinct de prévoir, de prendre garde. Comme si j’appréhendais le danger. Amélie ne me voit pas et je sais qu’elle monte en cachette sur l’âne Papou. Je la regarde et je souris. Son doudou je l’ai ramassé plusieurs fois et ramener à sa mère qui s’écrie chaque fois : David ! Tu es notre sauveur ! Sans son doudou

Amélie serait malheureuse. Avec toi David je n’ai jamais perdu de temps à le retrouver. Tu as le chic pour tomber pile dessus. Comme à mon habitude je fais un petit signe de main et je m’éloigne mains dans les poches.

Seul ombre au tableau : Manuella. Elle fouine partout, trop bavarde. Elle n’a pas renoncé à me lire les lignes de la main. Je refuse, c’est stupide de croire en cela. Quand elle peut m’attraper le bras, je me dégage très vite mais elle insiste : de quoi as-tu peur beau garçon ?

C’est moi qui parlerais, moi je te dis ! Pas toi ! Allez ! Donne-moi ta main ! Je m’énerve un peu dans ces moments là, je dis non d’un ton ferme et je sens son regard sur moi. Elle reste interloquée, je fais une caresse sur sa joue et je m’éloigne vite fait. On ne peut prévoir le destin, le destin se présente quand il veut, à nous d’être prêts !

SARAH
Après s'être occupée de ses deux chevaux, Sarah décida de se promener un peu dans le cirque. Après tout, c'était son nouveau foyer, même si elle s'y sentait pour le moment étrangère. En tournant la tête, elle vit l'âne qui la fixait tranquillement de son regard paisible. A croire qu'il l'observait ! A l'instant où elle allait partir, elle aperçut une petite fille qui se dirigeait prudemment vers les boxes des trois équidés. Elle ne l'avait pas vue.
La fillette s'approcha du boxe du petit âne et appella : "Papou, Papou, bonjour mon Papou, tu as bien dormi ?". Sarah toussa pour lui signaler sa présence, et la petite apparition sursauta en faisant un bond en arrière, prête à fuir. En s'apercevant qu'elle ne connaissait pas Sarah, elle reprit ses esprits et lui demanda : "T'es qui, toi ? Je te connais pas !".
"Je m'appelle Sarah", répondit la jeune fille. " Et toi ?"
"Amélie."
"Tu fais partie du cirque ?"
"Oui, c'est mon grand-père Firmin qui a le cirque. Il est génial mon grand-père; tu le connais ? Et puis d'abord, qu'est-ce que tu fais là ?"
Sarah lui expliqua qu'elle était la nouvelle écuyère arrivée la veille, et, à sa demande, l'emmena voir Opium et Libellule. Amélie se lança alors dans un discours sur les chevaux, et le cirque, et les trapézistes, et les chauffeurs de bus. Sarah avait un peu de mal à suivre. Pendant que la fillette parlait, elle l'observait. On aurait vraiment dit une petite apparition, une fée. Ses yeux pétillants avaient presque le même regard que celui de l'âne, rempli d'intelligence et d'ingénuité. D'ailleurs, celui-là les observait toujours. Il ne lui manque que la parole ! se dit-elle.
Pendant qu'elle faisait connaissance avec Amélie, le cirque s'animait. Une masse hétéroclite de gens du voyage s'affairaient dans tous les sens et la dévisageaient avec curiosité au passage. Une vieille gitane s'arrêta près d'elles. Son regard noir et inquiétant la transperça, si intensément qu'elle avait envie de rentrer sous terre. "Donne-moi ta main" lui dit-elle. Trop interloquée pour réfléchir, Sarah lui tendit sa main, que la vieille gitane prit entre les siennes. "Fais attention. Tou as menti pour arriver jousqu'ici. Fais attention. Très attention. Tou es la nouvelle écouyère, tou cherches quelqué chose mais tou né veux pas té l'avouer... Fais attention. Très attention." En voyant le regard ahuri de Sarah, elle ajouta : "Jé m'appelle Manouella. Viens dans ma roulotte si tou veux en savoir plous, mais méfie-toi."
Soudain, une cloche retentit, et la vieille gitane et la petite fille partirent au pas de course. Manuella disparut derrière le chapiteau, mais Amélie s'arrêta : "Viens ! lui cria-t-elle. C'est le petit déjeuner. Dépêche-toi ou il ne va plus rien rester pour toi !" Et elle courut à son tour de l'autre côté du chapiteau. Sarah la suivit lentement, mais elle avait le trac : elle allait être présentée aux gens du cirque Zindero, et elle avait plutôt interêt à faire bonne impression, surtout après ce que la gitane lui avait dit...

AMELIE
Elle a l'air gentille cette Sarah. Elle a bien écouté tout ce que je lui ai raconté sur le cirque et sur les tours d'acrobatie. Elle fronçait les sourcils tout en me regardant, mais c'était pas comme quand maman le fait, ç'avait rien de fâché. Là, ça ressemblait plus à quelqu'un qui essaie de comprendre, comme moi quand je fais mes devoirs de mathématiques et que je me creuse la tête. Elle, ça faisait pareil. Pourtant, j'ai pas l'impression que quand je parle ça fait comme les mathématiques!?...

Sarah, elle me fait un peu penser à tatie Colline.

Tatie Colline, elle est douce comme un bonbon au caramel qui fond dans la bouche. Elle crie jamais. Mais elle sourit plus non plus depuis l'accident... C'est la faute au destin y parait.
Ca c'est David qui le dit.
David, il parle pas beaucoup lui non plus. Grand-père, il m'a expliqué que c'est à cause qu'il a un problème pour dire les mots... il arrive pas à les dire d'un seul coup, alors le plus souvent, comme il a un peu honte, il préfère se taire.
Moi ça me dérange pas qu'il puisse pas les dire d'un seul coup ses mots! Au contraire, comme ça, j'ai tout le temps pour les comprendre! Mais David, ça doit le gêner. Alors il parle que quand il est tout seul. Ca je le sais parce qu'un jour je l'ai surpris juste devant la cage des jaguars.
Il faisait sombre et il était assis face à eux. Il les regardait sans rien dire jusqu'au moment où il s'est mis à parler. Et là, c'était vraiment un coup de magie, parce qu'il disait ses mots d'un seul coup!
A toute vitesse! C'est là qu'il a dit que l'accident c'était la faute au destin.
Je sais pas qui c'est le destin, mais il est vraiment méchant!
A cause de lui, tatie Colline ne vole plus dans les airs, et mon tonton Raphaël, il fait des représentations que pour les étoiles...
Tatie Colline est triste. Elle est comme un oiseau qui aurait perdu ses ailes. Ca me fait mal au coeur. C'est pour ça qu'avec elle, je suis la plus sage des petites filles. Je lui obéis toujours parce qu'elle crie jamais. Et parce que je voudrai bien qu'un jour, elle recommence à sourire... et qu'elle m'apprenne à faire du trapèze!

Tiens, Sarah me sourit et elle fait comme si elle attendait quelque chose de moi... heu, ça y est! Ca m'a encore repris! Je suis partie dans mes rêves et j'ai rien écouté de ce qu'elle me disait!... Maman dirait encore que je suis dans la lune... La lune... Ca doit être drôlement chouette d'y aller...
"Heu... tu connais mon doudou Sarah? Non?! Ben voilà! je te le présente!"
Ouf! Je me suis bien rattrapée pour cette fois ci! En fait c'est pas dur. Il faut juste imiter les grandes personnes quand elle veulent pas répondre à une question... elles parlent d'autre chose, et le tour est joué!

FIRMIN
Firmin était assis devant son bureau, dans sa caravane.

Un vrai chat noir. Voilà ce qu’il était devenu. Un vrai chat noir...

Tout avait commencé il y a un peu plus d’un an. Un défenseur des animaux complètement allumé avait voulu libérer les animaux du cirque en pleine nuit. Selon la police, il n’en était pas à son premier coup d’éclat. Il avait déjà fait de la prison parce qu’il avait essayé de libérer les animaux d’un zoo. Il avait donc réussi à ouvrir la cage des jaguars. Et en oubliant totalement sa propre sécurité, il avait essayé de faire sortir les jaguars de leur cage. Ce lui fut fatal. Quelle idée de réveiller des jaguars qui ne vous connaissent pas en pleine nuit ?

Bien sûr, l’enquète démontra que le cirque n’était en rien responsable. Mais cela n’avait été qu’un point de départ pour une série d’évènements.

A peine une ou deux semaines plus tard était venu l’accident.

Firmin ne voulait même plus y songer. Depuis un an que l’accident était survénu, il essayait de paraitre le plus fort possible devant son entourage. Le pire était que son cirque, et donc lui, avait été mis en cause. Comme si la responsabilité lui en incombait. Et peut-être était-ce le cas...

Cela faisait 15 ans que Firmin était à la tête du cirque. Et l’état du cirque et celui de Firmin était intimement lié. Quand l’un n’allait pas, l’autre n’allait pas. Et depuis quelques temps, les deux n’allaient pas bien.

Après la mort de son fils, car pour lui il s’agissait de son fils, dans cet accident, Firmin avait failli se faire retirer sa licence et fermer le cirque. Firmin était un véritable patriarche et il considérait sa troupe comme sa famille. Si il avait du virer sa famille, cela lui aurait peut-être été fatal. Il avait donc du faire rapidement le deuil de son fils (cela avait été très dur!) en s’efforçant de convaincre et, ainsi, de sauvegarder le plus possible ce pour quoi Raphaël s’était battu, à savoir le cirque Zindero. Aucun membre de la troupe ne lui avait reproché ce combat, après la mort de son fils, et il leur en était reconnaissant à tous.

L’autre combat avait été pour préserver sa petite fille, Amélie, du drâme. D’autant que cet évènement fit boule de neige.

Mélissa, sa compagne et la mère de Raphaël, avait baissée les bras peu après l’accident. Le cancer en avait profité pour reprendre le dessus. Elle avait du partir pour l’hopital. Mais cela n’avait pas suffit, malgré toute l’aide qu’avait essayé de lui fournir Firmin. Elle était partie il y a six mois. Toute la troupe, sa fille et Firmin l’avait soutenue.

Firmin devait être fort pour sa fille, qui venait de perdre son frère et sa mère, et pour sa petite fille. D’autres avaient besoin de son aide. Caroline, David, Marie et tous les autres. Depuis quelques mois, il essayait de remettre de la dynamique dans son cirque. Amélie, sa petite fille, avait redonné de l’envie à tout le monde. Elle semblait être celle qui luttait le mieux contre les évènements. Elle était vraiment incroyable.

Firmin sourit en pensant à sa pette fille.

De l’espoir, voilà ce qui commençait à naitre. Il avait été blanchi, il avait récupéré sa licence et maintenant il comptait bien faire en sorte que le cirque ressorte la tête de l’eau.

Il relut la première lettre.

Monsieur Firmin,

Veuillez par la présente me lire, je m'appelle jojo, et là sur la photo ci-jointe c'est moi, non pas le tigre, non pas le clown, mais vous le faites exprès! moi, je suis derrière tout le monde et pourtant vous ne pouvez pas me rater, eh oui la très grande femme d'une trentaine d'année (vous me donniez plus ... c'est normal ! j'ai toujours été plus mure qu'il n'est en réalité)bref le grand morceau de femme au bas mot 2m15 c'est moi!!! La troupe qui m'accompagne sur la photo n'existe plus, le cirque Athol a fermer le rideau depuis plus de 2 ans; et ça fait deux ans que je me tâte pour reprendre les routes avec une nouvelle troupe ...Quand on s'est séparé moi j'ai eu trop de mal... j'aime pas souffrir... mais faire agent de service au stade de grenoble ne me convient vraiment pas... J'arrête pas de me cogner partout... et puis les gens du voyage me manque,bref prenez moi a l'essai, je vous montrerai de quoi je suis capable car je ne suis pas qu'une femme géante je suis plus encore.
J'espère que vous m'aurez lu avec bien veillance, voici mes coordonnées... Jojo Muche, 25 rue des lilas, 38140 les Huches ; tel : 06 14 17 82 00
j'attends votre réponse car voyez vous je suis très motivées.

Jojo

Firmin sourit. Bien sûr qu’il allait l’engager! Cela faisait longtemps qu’on ne lui avait pas demandé de travailler pour lui. Et la lettre recellait d’un optimisme sans failles! C’est de ça qu’ils avaient besoin en ce moment!

Firmin hésita à relire la deuxième lettre. Une proposition d’engagement pour un mois. C’était inespéré. Firmin hésitait encore mais il devait accepter pour le cirque, pour sa famille. Il fallait qu’il en parle avec sa troupe, c’était comme ça que fonctionnait Zindero. Avant, il passa un coup de fil à cette Jojo et lui laissa un message pour dire qu’elle était engagée et qu’elle pouvait les rejoindre quand elle voulait.
Firmin sortit de sa caravane et jeta un oeil bienveillant sur Papou, l’âne. Il fallait qu’il réunisse tout le monde...

PAPOU
C'est vrai, je ne suis qu'un ane et lorsque Monsieur Firmin m'a trouvé, je faisais pitié!!

J'étais là, à manifester pour un peu de grain,
un peu de respect,
un peu de liberté,
un peu de reconnaîssance,
beaucoup de tendresse surtout....

Il voulait un âne pour faire le clown .....et le premier soir se fut une catastrophe ....tout le monde se mit à pleurer!

Il me donna les lions à dresser mais ....ils ont failli me dévorer!

Il voulait me mettre en équilibre mais j'avais les deux pieds dans le même sabot!

Alors, depuis...je suis là...je regarde....j'écoute....et je me raconte ...rien que pour moi!

Aujourd'hui , j'ai regardé Jojo sur la photo, la grande jojo!
Monsieur Firmin avait sa candidature sous les yeux et il disait " elle est grande quand même !"
Mais moi , je savais qu'il allait lui dire de venir et moi je savais que jojo allait devenir une bonne copine et....
et, le premier qui touche à elle !!
PAN , un bon coup de sabot...

Lorsque Firmin m'a accueilli , il avait un visage d'humain ,
un de ces visages qui ont vu et trop regardé ,
un de ces visages qui ont tant à raconter mais qui veulent tout cacher,
un de ces visages qui attendent toujours le printemps!

Je ne savais rien de ses drames , je ne savais rien mais je devinais tout ....
Je savais que jamais, non jamais il dirait " tu n'es qu'un ane!!"
Que jamais , non jamais , il dirait "mais que vais je donc faire de toi!"
Je savais, qu'il aimerait pour moi, pour ce que je suis et non pour ce que je représente!
Et puis , il y avait Amelie qui montait sur mon dos depuis longtemps et me disait " Tu es le cheval de Zorro!!"...

Et là devant la lettre, j'avais lu une pointe d'espoir au coin de l'oeil ,
de cet espoir qui reste même dans le malheur ,
de cet espoir qui renaît toujours bizarrement !

JOJO
Je reviens de mon boulot aie hiiii aie hooooo ! j’adore cette chanson peut-être parce que ce sont des nains ? ? ? et j’ai un message sur mon répondeur, un message rien que ça ! JE VAIS DE NOUVEAU REPRENDRE MA PLACE DANS LE MONDE DU CIRQUE ! ! ! avez vous déjà vu une girafe danser dans un salon de 4m2 ? ? ? avez vous déjà vu une albatros déployer ses ailes dans une boite de coca ? ça n’existe pas ! ça n’existe pas ! et ben si !
Bon, j’ai des tas de choses à préparer…. MES VALISES ! ! ! vite fait … DONNER MA Démission, quand j’y pense j’ai fait des pieds et des mains pour obtenir se poste,( des pieds du 52 fillette, des mains très jolies oui mais de la taille de mes pieds… ENFIN ! ) et dés demain je vais pouvoir dire :

- bonjour Mr Troublion avez vous un instant a m’accorder ?
- Si c’est vraiment nécessaire je vous écoute .
- Et bien voilà je vous donne ma démission.
- C’est tout ? Vous comptez nous quitter quand ?
- TOUT DE SUITE Mr TROUBLION
- Mais bien sûre, vous savez qu’il vous faut faire un préavis, on doit vous trouver une remplaçante, ce ne sera pas long, faire la serpillière beaucoup de gens savent très bien faire même si vous excelliez dans ce domaine.
- Je veux partir Tout de suite Mr TROUBLION
- Eh bien c’est simple je vous renvoie pour faute grave, et soyez sûre madame muche que votre prochain employeur y regardera a deux fois, de toute façon vue votre allure démeusurément anormale, vous n’aurez plus la chance que vous avez eu ici.
- Pouvez-vous me donnez mon solde de tout compte!
- N’y compter pas, ahahahahaha ! ! ! mais vous pensez que votre taille peux justifier de toutes les audaces, vous vous croyez forte, vous osez me narguer, mais vous ne m’impressionner pas ma petite dame, vous me faites pitié.
- Mr Troublion les gens de votre espèce sont pitoyable, je ne tiens pas a encombrer ma vie de votre présence morne et moisie, oui vous sentez le moisie, vous êtes en décomposition depuis votre naissance, d’ailleurs, vous êtes mort avant même d’être naît vous n’êtes pas, vous n’existez pas. Regardez moi bien Mr TROUBLION je vous demande une dernière fois d’appeler la comptabilité et d ‘établir mon solde de tout compte ! ce n’ est pas une menace, c’est un ordre. (parfois je peux vraiment faire la forte ,j’ai une assurance dans ce que je dis, je m’étonne moi même, ensuite je lui fait le N° de L’envole, ça va tellement lui faire drôle a ses petits yeux que je crois qu’il n’est pas prêt d’embaucher à nouveau une femme de 2M15... qui sait si bien jouer avec son corps. L’envole consiste a oublier que je suis composée d’un squelette. Mon corps peu atteindre n’importe qu’elle forme, je peux me faufiler dans une boîte de sardine si le cœur m’en dit, l’envole c’est le déploiement de mes bras, dans une envolée, je deviens oiseau, rapace, bien sûre sous chapiteau j’ai mon trapez,, je grimpe dans les airs, je fais des figures de danseuse étoiles, dans ses moments ma taille n’a plus d’importance, je suis petite ou grande.. tour a tour, je vole je virevolte je chante aussi , une fois l’échauffement terminé je glisse jusqu’au sol et je continue par le n° suivant en faisant des arabesques au sol des pirouettes avant arrière, double triple, à vous faire tourner la tête. J’arrive a m’envoler même a terre, mais là dans le bureau je lui ferai juste un aperçu, une façon de m’entraîner en somme ! et si ça ne suffit pas je pousserai la chansonnette du cri du tambour tiens encore un nain, mais comment a –t-il fait pour ne pas grandir celui là…)

OUI voilà ce que je ferai demain si par hasard Mr TROUBLION décidait de troubler mes projets. Ensuite je téléphonerai a Marcelle une collègue qui cherche un appartement et je lui demanderai si elle ne veut pas le mien, ainsi les proprios ne me fâcherons pas ! Mais pour ce soir je vais préparer mes paquetages, c’est que mes petites culottes aussi prennent de la place… Je suis tellement heureuse de reprendre la route, je suis tellement impatiente de faire connaissance avec ces nouvelles personnes qui en somme me ressemble un peu. UN tout petit monde en représentation dans d’autres petits modes. Et comment va-être ma roulotte, j’ai hâte d’y poser mes odeurs, mes couleurs et d’inviter quelque affinité d’ un soir pour une soirée chant et histoire de vie. Enfin ! je vais retrouvé ma vrai place, la place de la liberté D’être comme je suis au milieu du monde ! surtout plus jamais une serpillière géante.
CIRQUE ZINDERO ME VOILAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA !

ELYSABETH
C’est Pedro qui est venu me réveiller. J’aime bien faire une petite sieste dans la journée. Dans un cirque, ce n’est pas un luxe car on se couche souvent très tard et on se lève très tôt. Cela, je l’ai appris, pendant cette presque année de participation au cirque Zindéro. Et encore, à en croire les autres qui pour la plupart sont là depuis plus longtemps que moi, le cirque n’a absolument pas atteint son rythme de croisière. C’est depuis l’accident que le cirque va mal. Moi, je suis arrivée après, je n’ai donc pas pu comparer l’avant et l’après. Je suis arrivée après, mais peu après. Tout le monde était encore sous le choc. C’est peut-être aussi parce qu’il était sous le choc que Firmin m’a engagé.

Au fait, je me présente, je suis Elysabeth Gérand. Oui, avec un "y". Ma mère y tenait, comme pour marquer une différence avec toutes les autres Elisabeth. En fait, je n’ai jamais vraiment été attirée par le cirque. Au début, je me suis lancée dans le théatre et c’est par un étrange concours de circonstance que je me retrouve clown, aujourd’hui. Ou peut-être devrais-je dire clowne. Je suis arrivée au cirque Zindéro sans aucune expérience du métier de clown mais avec mon expérience d’actrice. Firmin cherchait un remplaçant au partenaire de Pedro, le clown maison. Raymond, son partenaire est parti prendre sa retraite.

Le fait que je n’ai pas d’expériences de clown n’a pas dérangé Firmin. Il a même du trouver amusante l’idée d’avoir une clown. Peut-être aussi que, comme je le disais, c’est parce qu’il était sous le choc. En tout cas, tout le monde a été content de moi et notre duo de clown, Ely et Pedro, commence à être suffisamment rodé. Dans l’intervalle, j’ai même appris à jongler. Car dans un spectacle de clown, il ne suffit pas de faire le clown!! Il faut aussi jongler, chorégraphier ses mouvements, etc...

Heureusement, Pedro a de l’expérience et il m’a appris beaucoup. On a décidé ensemble qu’il serait plus amusant que je fasse "Laurel" et que lui fasse "Hardy". Ou du moins, quelque chose approchant.

Pedro m’a expliqué que Firmin voulait nous parler à tous. C’est une chose qui arrive assez souvent dans ce cirque. On aime tous se réunir car, malgré les petites dissensions, on est tous unis, surtout après ce qu’il s’est passé.

J’ai demandé à Pedro de m’attendre. J’aurai aimé prendre une petite douche, mais j’ai du me contenter de me passer de l’eau sur le visage. Pour le moment, je suis une de ceux qui ne partagent pas leur caravane avec quelqu’un d’autre. Lorsque Firmin a annoncé qu’une écuyère, Sarah je crois, allait nous rejoindre, j’étais certaine qu’on partagerait la caravane. En fin de compte, je crois qu’elle partage la caravane de quelqu’un d’autre mais je ne suis pas sûre. J’aurai du proposer à Firmin, cela m’aurait fait plaisir de partager ma caravane avec une autre jeune fille. Je l’ai à peine aperçue, dans la matinée, elle donnait à manger à ses chevaux. A mon avis, c’est un bon investissement car avec ses chevaux, elle paraissait très complice. Elle est sans doute un peu plus jeune que moi. J’ai 24 ans, depuis deux jours. Je n’ai osé le dire à personne car en ce moment, il y a un autre anniversaire, beaucoup plus tragique...

J’espère que Sarah ne partage pas la caravane de Manuella! La pauvre!! Non pas que Manuelle soit méchante, mais de là à vivre sous le même toit!

Bon, je crois que Pedro m’attends. Tant pis pour lui, après tout, je suis peut-être clown mais je suis aussi une femme! Je n’ai pas de raisons de me presser! Non, sérieusement, je ne veux pas faire attendre Firmin. Je crois que je suis prête.